Un roman engagé contre l'apartheid, prix Médicis étranger 1980.
On ne sort pas indemne d'une telle histoire mais plus instruite et révoltée contre ce qui a été le destin de tant de sud africains sous ce régime raciste et barbare. Est-il besoin de préciser qu' Une saison blanche et sèche fut interdite de publication dans ce pays ?
Si les personnages sont fictifs, en revanche, "Rien dans ce roman n'a été inventé" et c'est ce qui en fait la force et le désespoir. La réalité de ces vies brisées dépasse la fiction et le déroulement tragique naît d'un régime qui détruit de sa force implacable, les vies de tout opposant.
L'histoire commence lorsque le journaliste narrateur reçoit de son copain d'université, Ben Du Toit, les documents liés à l'enquête sur les morts de Jonathan et de son père Gordon Ngubene. Ben avait financé les études du fils à la demande de Gordon, jardinier noir de l'établissement où il enseignait. Le professeur apeuré meurt quelques jours plus tard, assassiné. Le narrateur lui prête alors sa voix pour reconstituer les évènements et raconter ces vies broyées.
Ce livre fort et dur retrace la descente aux enfers d'un banal professeur, héros presque malgré lui qui perd tout en s'attaquant aux monstrueux rouages d'iniquité et de racisme qui régissent ce pays. Abandonné par les membres de sa communauté et par les siens parce qu'il voulait que justice soit rendue, cet homme ira jusqu'au bout de sa démarche avec finalement un courage obstiné qui force l'admiration.
J'ai été effarée par les descriptions de la misère et de la haine ordinaire, par le racisme institutionnalisé d'un pays rongé par la lâcheté et l'indifférence où la vie d'un homme noir n'a aucune valeur.
Construit comme une enquête journalistique, si bien écrit qu'il transpire de la chaleur étouffante de l'Afrique et suinte de peur, ce roman est une grande leçon d'humanité qui interroge le lecteur sur son propre courage face à l'injustice. Le film adapté de cette histoire offre une fin plus optimiste que le livre et (je le crains) que la réalité !
Inès-Marie